Augmentation des tarifs de l’électricité: que vont payer les usagers?
Le calcul du coût de la transition énergétique
Transition énergétique en Allemagne : le prix des énergies renouvelables, qui serait trop élevé, est souvent avancé comme argument pour freiner leur développement. Or, à y regarder de plus près, le raisonnement est biaisé.
- Document PDF : Augmentation des tarfis
Ainsi, en Allemagne comme en France, le système de subventions aux Énergies Renouvelables profite aux opérateurs. Ces derniers sont subventionnés pour un montant égal à la différence entre le tarif de rachat qu'ils payent aux producteurs de renouvelable et le prix de marché (c'est-à-dire ce qu'ils auraient payé en allant sur le marché, sans cette obligation d’achat).
Le prix de marché reflète le coût marginal (variable) de l’Énergie (indépendamment des coûts d’investissement). Or le coût marginal des énergies renouvelables est nul (une fois l’éolienne installée, cela ne coûte rien de plus qu’elle produise un kWh supplémentaire). Donc au fur et à mesure que la part d’Énergie Renouvelable augmente dans le mix énergétique, le prix de marché baisse… et le montant des subventions augmente ! C’est ce qui se passe en Allemagne, où le parc d’ENR devient conséquent, pour le plus grand profit du cartel d’énergéticiens qui délivre l’Énergie aux usagers.
On pourrait en conclure un peu rapidement, en se basant sur le montant des subventions, que cela signifie que les ENR coûtent cher.
Considérons maintenant le coût du thermique : combien vaut l’émission d’une tonne de CO2, qui aura des conséquences environnementales – et donc à terme économiques – graves ? Moins de 3 euros cours plancher qu’il a atteint cette année ? 30 euros, cours visé par la Commission lors de l’introduction de ce mécanisme ? 100 euros – cours cible pour 2030 d’après M. Rocard qui avait présidé la table de travail sur la taxe carbone ? Ou plus, pour tenir compte de l’aggravation des prévisions en matière de réchauffement climatique? En fonction des réponses, le coût de la production d’une centrale à charbon, et sa rentabilité par rapport à une centrale à gaz, à de la biomasse ou du solaire, change complètement.
L’effondrement du coût de la tonne de CO2, lié à l’incapacité de l’Europe à se mettre d’accord pour réduire les quotas de CO2, associé à l’effondrement du cours du charbon en raison du recentrage des États-Unis vers les gaz de schiste, a rendu les centrales à charbon très compétitives, entraînant une augmentation de leur production en Europe (France incluse), et particulièrement en Allemagne.
Un dernier point : pour une grande part des coûts de l’Énergie, en particulier dans des énergies à forts investissements à long terme comme le nucléaire, le coût de rémunération (taux d’actualisation) est décisif. Or il est fixé depuis des années entre 8 et 10%, alors qu’EDF peut emprunter sans problème à 4,5%, comme l’a montré le dernier emprunt public souscrit, et même probablement à bien moins.
Pourquoi l’évolution d’un tel paramètre n’est-il jamais étudié ?
On le voit, le « coût de l’Énergie » est très complexe à déterminer et comporte une forte dominante politique : on peut lui faire dire beaucoup de choses. Ne considérer que le prix de marché revient à faire reposer le choix du mix énergétique sur des critères à très court terme, et de plus biaisés par de nombreux facteurs, ce qui est absurde. Il est au contraire nécessaire de regarder ce que « coûte » vraiment chaque filière de production et de stockage d’Énergie pour la collectivité, c'est-à-dire en particulier :
- son « coût » en termes d’impact écologique et d’acceptabilité;
- la disponibilité à long terme des ressources qu’elle utilise ;
- la main d’oeuvre nécessaire – ce dernier point n’étant pas essentiel dans des pays en situation de sous-emploi structurel.
C’est seulement en prenant en comptes tous ces critères, qu’on pourra vraiment dire si les énergies renouvelables sont plus « chères » que les énergies fossiles, et faire des choix raisonnés. Reste ensuite, bien sûr, à intégrer les contraintes techniques de viabilité d’un bouquet énergétique (problèmes d’intermittence notamment).
Extrait du bulletin de SUD Energie – EDF R&D d'octobre 2013